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janvier 2018, Aubervilliers, France
On le sait, c’est un peu comme une mission impossible, ce projet.
Une résidence-laboratoire dans deux quartiers d’Aubervilliers pendant cinq jours en plein hiver afin d’expérimenter des formes de théâtre-journal dans l’espace public à partir des récits des habitant.es et des actualités du moment.
TATATATAN !
Ça sonne presque comme une blague. Bon, mais on aime ça les blagues.
Alors, en ce samedi pluvieux, on est sept autour de la petite table basse de la Fabrique des Mouvements à se demander en souriant malicieusement par quel bout on commence.
Cette idée de travailler sur des formes de théâtre-journal est née en Colombie, avec le projet Apartados qui met en parallèle les accords de paix entre les FARC et le gouvernement à travers du discours du Prix Nobel de la paix du président Santos, et des communiqués d’une communauté paysanne en prise à une nouvelle incursion paramilitaire dans son territoire. De là, l’envie d’expérimenter cette même mise en parallèle dans le contexte français, et avec les ami.es resté.es là-bas…
Pour expérimenter des formes dans l’espace public, il nous faut en créer et pour en créer, nous avons besoin de plusieurs éléments:
– des actualités racontées par les médias
– des récits de vie ou images récoltés dans les quartiers
Donc notre semaine va s’organiser autour de quatre activités, dans l’ordre et le désordre:
– aller dans le quartier à la rencontre des réalités et des habitant.es
– fouiner dans les journaux et autres médias
– créer des petites formes théâtrales
– jouer les petites formes théâtrales dans des espaces publics
Ce qui suit n’est en rien une analyse exhaustive de la recherche menée, mais plutôt une sorte de florilèges d’images, de rencontres, d’ambiances glanées durant ces cinq jours. Histoire de vous transmettre la sensation qu’il nous reste : celle de la découverte d’un chemin qu’il nous faudra parcourir avec beaucoup plus de temps…
Brève introduction : Qu’est ce que c’est que le théâtre-Journal ?
Le théâtre-journal est une des premières techniques développées par le dramaturge Augusto Boal et sa troupe et fait partie de l’éventail du théâtre de l’opprimé. Créé dans les années 1960-70 au Brésil comme forme de résistance au régime de la dictature militaire, le théâtre de l’opprimé.e est un ensemble de techniques théâtrales qui visent à révéler les rapports d’oppression qui nous traversent et à faire émerger de l’analyse, du débat et des possibilités de transformation individuelle et collective.
Le théâtre-journal consiste en techniques simples permettant de transformer des nouvelles de journaux, ou tout autre matériau non-dramatique, en scènes de théâtre. En sortant ces nouvelles de leur contexte, en les lisant de manière insolite ou grossie, en faisant une lecture rythmée ou chantée, ou encore en les accompagnant d’éléments visuels ou sonores, d’éléments historiques, en les mettant en parallèle avec d’autres textes ou d’autres situations vécues, on peut mettre en évidence le caractère tronqué et aliénant de l’information publique.
Le théâtre-journal est une forme de théâtre de rue, populaire, qui vise à susciter le débat et la participation du public, pour réfléchir collectivement aux réalités que nous vivons en les confrontant aux discours politico-médiatiques, et en remettant au cœur des interactions les émotions et le vécu.
À la rencontre des quartiers : des lieux et des gens
La Poule Mouillée
C’est un lieu de rencontres où affluent des habitant.es des quartiers alentours, le nouveau Lidl d’Aubervilliers. On y rencontre une foule qui s’égraine, se laisse glisser sur les escalators avec ses chariots vides, ressort encombrée de courses de toutes sortes, de petites promos en bonnes affaires…
C’est très grand, c’est toujours plein et il y fait chaud.
Alors quand on a cherché des lieux où rencontrer des habitants, où récolter des histoires de vie, susciter des discussions et des débats, on y a tout de suite pensé. Ce Lidl, c’est un des rares points sociaux névralgiques du quartier, surtout lors d’une des semaines les plus pluvieuses de l’année.
On se poste là, dans le hall. On se demande si on ne devrait pas plutôt aller dans les rayons. Comment amorcer une conversation ? On piétine. Ça avait l’air plus simple sur le papier, ce machin de « récolter la parole des habitant.es ». Bon, et puis, hop, on se lance.
On a préparé une question simple, on verra bien à quoi ça nous mène : « Imaginez, vous avez une poule, elle a pondu des œufs toutes ces dernières années, et puis un jour, elle arrête de pondre des œufs. Qu’est ce que vous en faites ? »
On s’est dit qu’on avait envie de travailler sur la question du travail, et alors sur celle du chômage, et donc celle de la productivité ; d’abord parce que le projet de loi sur l’assurance chômage est en débat et puis parce que ces derniers temps les insultes aux chômeur.ses n’ont pas cessé de pleuvoir, humiliantes et tranchantes comme des couteaux. Alors quand Michel nous a parlé de cet article sur cette ferme pour poules à la retraite, on a biché. Bon évidemment, cette histoire de poule, c’est un peu réducteur, mais l’idée c’est de tenter sans trop douter.
C’est une excuse pour enclencher la relation. Et contre toute attente, ça marche plutôt.
« Ben je la fais d’abord ausculter par des gens habilités pour ça… »
« On a une grande voiture, y aura toujours une place pour elle ! »
« C’est pas grave, je lui ferai couver les œufs des autres poules »
« Ben je la garde ! On jette pas une femme sous prétexte qu’elle peut pas avoir d’enfants ! »
« On pourrait l’inviter à un repas ; la manger c’est aussi partager un moment ensemble, non ? »
Et de poule en aiguilles, les gens se mettent à parler, longtemps. Certain.es restent 20 minutes à raconter leurs morceaux de vie, du désir d’obtenir un CDI, aux raisons économiques qui les poussent à faire tant de trajet pour venir jusqu’au Lidl ; de leurs scrupules à demander le chômage pour laisser l’argent aux autres, à leurs colères ténues mais fermes: “personne ne choisit de se la couler douce à la maison !”
Finalement, grâce à la poulette, on arrive à récolter des récits par rapport à cette question du travail et du chômage, et par rapport à cette culpabilisation des chômeur.ses. Surtout, on se rend compte que, contrairement à ce que nous font croire les médias et discours politiques, le monde ne se réduit pas aux actif.ves et aux chômeur.ses ; qu’il y a une infinité de manières de vivre le travail, de s’activer et de chômer. Mais ça ne rentre pas dans leurs numéros.
Le cheval gagnant
Il règne un silence religieux. On n’entend que la voix enthousiaste du commentateur. Et puis le bruit des pages des journaux spécialisés. Celui des pièces de monnaie dans la machine. Tou.tes les client.es ont les yeux rivés sur l’écran. C’est à en avoir le souffle coupé, tant de concentration.
Au Café de la paix, celui qui est en face du Lidl, l’ambiance est à la compétition. L’enjeu : parier sur le cheval gagnant. Pour cela, pas d’alliances possibles. Chacun.e joue dans son coin, taiseux et méfiant; espérant secrètement remporter le prix de la vérité, et ne pas avoir à le partager.
On s’est assises à une table. On sirote nos cafés. C’est un autre des lieux de sociabilité du quartier, le PMU. On a décidé qu’on viendrait essayer de comprendre comment ça marche ce machin-là. Et puis ça nous donne un prétexte pour occuper la table des habitués.
Face à tant de concentration, on se tait et on regarde ; on écoute le commentateur.
“Il est teigneux, il est brave, il veut gagner…”
“C’est un très bon cheval, même si c’est un cheval étranger”
“ Ça ne s’annonce pas facile pour cette jument, face à des chevaux plus jeunes et sans doute plus doués qu’elle”
“ Sa forme ne fait pas défaut mais il a manqué de réussites”
“C’est un cheval difficile mais qui a des moyens”
Si ce n’était pas pour le mot “cheval”, on croirait entendre les commentaires des profs aux conseils de classes du collège. Ou bien le discours pêchu des pros du coaching/ management. Tiens, le voilà peut être le rapport à l’actualité… cette histoire de compétitivité… Mais chut, laisse venir !
Après quinze minutes, on finit par oser saluer un monsieur et lui demander de s’approcher. On chuchote pour pas déranger le reste des joueurs : “Excusez nous… En fait, on aimerait bien savoir comment ça fonctionne, les courses de chevaux…” Ça l’amuse, notre question. Il s’assoit, illico. Il a l’air content qu’on demande. Il appelle un copain ; qui s’assoit aussi. Et puis ils commencent à nous expliquer : les jockeys, leurs expérience ; la disqualification pour les chevaux qui ne courent pas à la bonne allure ; le choix de certains jockeys de déferrer leur cheval: ça leur use le sabot rapidement mais comme ça ils vont plus vite.
Ça va vite de faire les parallèles avec le marché du travail, non?
“Vous voulez tenter ? Tente la date de ton anniversaire, comme ca, au pif. Ou bien un numéro que t’aimes bien.” Tu parles ; ils vont pas non plus nous donner leurs astuces. Préfèrent se réserver la victoire. Ca les fait marrer qu’on tente sans rien savoir. Bon, évidemment, on perd. Nos deux compères aussi. C’est Exotica qui l’a remporté. Elle l’a pas volé, avec un nom pareil !
“C’est de la chance” ils disent.
Talent, moyens, chance?
Mouais. “ Mais vous, vous avez déjà gagné ?”
“Ben ouais! On est là pour gagner.”
Et puis ben c’est l’évidence : La française des jeux, c’est comme le capitalisme, tout le monde joue (tout seul), mais les seuls qui gagnent vraiment, c’est ceux qui inventent le jeu.
Interventions dans l’espace public : tentatives
La Cravate Solidaire
Assistance Réussite -Donnez vous enfin les moyens !
La pancarte postée à la sortie du RER attire la curiosité de plus d’un passant.
On a sorti nos plus beaux manteaux ; on s’est lissé les cheveux ; on a l’air correct.es. Aujourd’hui, on a décidé de se faire passer pour une agence de coaching pour chômeurs. L’idée est née d’un article de la veille : la direction de Pôle Emploi Hauts de France a envoyé un mail à tous les agents pour leur demander d’amener au travail toutes leurs vieilles cravates, tailleurs, vestes et mallettes pour en faire don aux chômeurs. C’est l‘association « La cravate solidaire » qui est à l’origine de cette brillante idée : les chômeurs n’ont parfois pas les moyens ou le temps de se vêtir correctement pour un entretien d’embauche ; un accessoire comme une cravate peut être le petit plus qui leur donne la confiance nécessaire pour décrocher un emploi.
Nous, en lisant ça, on a pensé à Vincent rencontré au café et qui nous avait dit avec beaucoup d’aplomb: « c’est pas la cravate qui compte, c’est la tenue, le fait de se tenir. Si tu portes la banlieue avec toi, ils vont pas te prendre. »
Et puis on a pensé à la poule aussi, et aux chevaux. A la bonne allure qu’il leur faut avoir pour ne pas être disqualifié, au poil lisse et brillant qui fait parier les joueurs ; à la supposée chance sur laquelle repose la réussite. A l’éternelle culpabilisation des chevaux perdants.
Alors on a eu envie de savoir ce que pensaient les passants de tout ça. On a voulu tenter une nouvelle manière de récolter les expériences, en utilisant le théâtre même. Le dispositif est simple : à la sortie du RER, quatre personnes affublées des badges « Assistance réussite » interpellent les passant.es qui veulent bien s’arrêter. Elles leur font répondre à un questionnaire autour de la notion de réussite ; puis les guident vers une valise contenant des cravates de toutes sortes et divers accessoires. Elles font essayer les passant.es puis les prennent en photo. Tout au long de l’intervention, le discours est celui du management dans toute sa splendeur. Les supposés coaches guident ensuite les passants vers deux d’entre nous qui leur explique notre démarche et récoltent les réactions.
« Tu crois qu’avoir une cravate pour passer un entretien d’embauche te donne plus de confiance ? »
Yassa rit allègrement. C’est la question qui la fait rire. C’est qu’elle n’a pas vraiment l’air de manquer de confiance, Yassa. Avec son diplôme d’ingénieure électromécanique en poche, ses expériences en Norvège et au Canada, et les étincelles qu’elle a dans les yeux et dans les mots, elle n’a encore jamais décroché un emploi. Au téléphone pourtant, les employeurs ont toujours l’air très emballés. Mais après la rencontre, ça ne va jamais plus loin ; ça se solde par un « Je vous rappelle » qui ne donne jamais suite.
La semaine dernière, Yassa a participé à un stage de coaching pour des jeunes qui ont des diplômes et ne trouvent pas de travail. Elle a été dégoûtée : on lui a gentiment conseillé de retirer son voile pour pouvoir trouver un emploi. Faire ce petit effort là. Juste ça. Elle s’y refuse. Elle veut qu’on l’embauche comme elle est, ou pas du tout.
« Ils veulent qu’on mettent une cravate pour pouvoir nous tenir en laisse ; faire ce qu’ils veulent de nous. Moi j’en mets pas. Je veux pas qu’on m’oblige. » Yassine, la cinquantaine, est énervé. Il parle fort, et avec de grands gestes. Il se refuse d’être leur chien en cravate, aux dirigeants, patrons et politiciens.
« Les chômeurs ils trouvent pas de travail parce qu’ils veulent pas travailler, c’est tout. Moi, par exemple, je suis chômeur ; ben je veux pas travailler. Si le salaire minimum était plus haut, ce serait différent. Mais là, tu te casses le dos pour un salaire de misère. Avec un smic, tu paies ton loyer , et après qu’est ce qu’il te reste ? » Hamza, casquette vissée sur la tête, ne mâche pas ses mots. « Quand ils augmenteront les salaires, je me mettrai à travailler ».
Nous réussissons ainsi à récolter des réactions et récits de vie. Mais dans l’ensemble, l’expérience ne fonctionne pas comme nous l’attendions. Là où nous pensions récolter des réactions de désaccord ou de colère, nous récoltons plutôt des hochements de tête polis. Alors que nous pensions pouvoir discuter en profondeur du projet de société qui s’insinue derrière « la cravate solidaire », les passants s’arrêtent souvent à l’anecdotique de la cravate en entretien d’embauche. Il nous semble analyser quelques unes des causes de cet « échec ». D’abord les passants croient à notre mise en scène comme une situation réelle et se plient au questionnaire et au discours avec une grande obéissance. Il semble que nos badges et le relatif sérieux du dispositif ont une certaine valeur d’autorité qui ne laisse pas beaucoup de place à la contradiction. Ensuite, nous supposons que ce qui nous choque dans la cravate solidaire –à savoir le discours normatif et culpabilisant des chômeurs, est en fait une vision du monde tellement entendue et rabâchée continuellement qu’elle ne choque plus. La caricature que nous pensions faire du discours managérial en vigueur s’avère en fait être une pâle copie de la réalité.
Choose france
Tapis rouge, coupes de champagne, drapeaux tricolores. Deux valets coiffés de perruques du 16ème siècle s’activent dans l’espace à la cadence de la Marche des turcs de Lully. Un policier à moustache, quelque peu menaçant, empêche l’entrée, posté à côté du panneau annonçant le grand événement : Choose France. Si c’était sans compter le froid et l’humidité hivernale qui s’immisce jusque sous les manteaux, le jus de pomme à la place du champagne, et puis les couleurs de peaux et les accents du public, on s’y croirait presque, à Versailles.
Nous sommes sous la ligne du RER B à la sortie de la station La Courneuve-Aubervilliers. Quelques curieux.ses interrompent leur course folle vers les quais pour regarder ce que manigancent ces deux valets en costard-cravate. Et pourquoi ce Choose-France ? Ça en agace déjà plus d’un cette bouffonnerie à la française.
Et puis d’autres personnages arrivent, des riches en fourrures, accueillis à bras ouverts par les deux lèche-cul qui les affublent de noms de grandes entreprises : Google, Macdonald, Danone, Carrefour, Facebook… Ah, ce sont donc des entrepreneurs, des patrons quoi. Certains sont détectés au milieu des spectateur.ices et invités au grand dîner privé. Les autres spectateur.ices n’ont droit qu’au regard noir du policier. Les invité.es prennent un malin plaisir à jouer les riches : lèvent le petit doigt, parlent avec une patate dans la bouche et s’étonnent qu’une sauterie de cette taille ne coûte que 600 000 euros. Et on rit. C’est bon de se moquer de ceux qui passent leur temps à nous piétiner.
On entend le Menu du chef Ducasse, le prix de la soirée, les magouilles de licenciement et de paradis fiscaux. Et puis soudain, l’annonce du discours du président. Sur la table du banquet, une cloche se soulève découvrant un jeune poulet à l’écharpe tricolore. « You are rich, you have money : I love you ! France loves you ! Welcome To France ! Choose France ! »
Dans le public: “C’est Macron, c’est Macron”. Rires.
Fin du discours. Cotillons. La marseillaise, entonnée au Kazou, est interrompue par Pauline qui se hisse avec véhémence sur un plot et annonce le projet de loi asile et immigration proposé par le gouvernement : toujours plus de contrôle, l’interdiction à l’hébergement d’urgence pour les sans papiers…
L’idée de cette petite forme est née il y a deux jours de la collusion de deux informations différentes, celle du grand dîner qu’organisait Macron pour inviter les 140 PDG les plus influents du monde pour une grande soirée de gala à Versailles, évènement intitulé Choose France, et celle du nouveau projet de loi sur l’immigration en lien avec la lutte d’un collectif de sans papiers dans un des quartiers d’Aubervilliers où on travaille. Et alors cette mise en parallèle assez évidente… Qui accueille-t-on en France? Qui expulse-t-on? Et quel lien de cause à effet?
Choose France ? Choose France pour qui et pour quoi ? C’est la question qui est posée. Et il semble que le public comprend. Et écoute avec attention l’invitation qui est faite à la manifestation de samedi contre cette loi. Et reçoit avec reconnaissance les tracts distribués par trois membres du collectif de sans-papiers d’Aubervilliers rencontrés il y a deux jours dans le quartier.
C’est notre dernière soirée de résidence sur le théâtre-journal. On joue une dizaine de fois, et puis on remballe. On est content.es. On s’est bien marré.es. Y a eu du monde, finalement. Et puis des gens en colère, ragaillardi.es par cette petite mise en scène. Bien sûr c’est loin d’être le grand soir. Mais on a l’impression que quelques paroles se sont libérées, et qu’au moins, on s’est senti.es plusieurs à être touché.s par le sujet… Ça aura peut être permis de faire passer l’info de la manifestation de samedi. À se rencontrer et rire, histoire de se donner du courage.
Et puis, nous reste dans le cœur une certaine malice à la pensée qu’on a déshabillé Versailles à Aubervilliers.
Conclusion: de l’envie et beaucoup de questions
On est content.es de notre semaine. Le peu de temps que nous avions nous a permis de nous jeter à l’eau et d’essayer pleins de manières de récolter de la matière, sans trop se poser de questions. On a fait de belles rencontres. On a réalisé combien les gens avaient besoin et envie de parler de leurs expériences, de leurs colères et de partager un instant dans l’espace public. On s’est amusé.es à créer ensemble. On a rencontré un collectif de lutte dans le quartier ; on a mis nos outils au service de leur urgence du moment : convoquer pour la manifestation de samedi.
Bien sûr, il nous reste de la frustration, aussi. L’envie de recommencer cette aventure avec un mois devant nous. De chercher plus, d’embarquer des habitants dans notre bateau.
Et puis surtout cette semaine a ouvert beaucoup de questions par rapport au théâtre journal, par rapport à notre posture, nos objectifs. Celle-là plus forte que les autres : comment créer des formes du point de vue des opprimé.es, vraiment ? Avec le théâtre forum, c’est facile, il y a des techniques pour ça. Mais en théâtre journal ? Comment ne pas calquer notre vision du monde et chercher à faire accoucher les gens de ce que nous voulons entendre ? Comment ne pas tomber dans du pamphlet ou du théâtre militant, mais créer du débat, ouvert ?
A suivre, donc…